A la parution de l’ouvrage l’effet fut ravageur. En osant un regard derrière ces coulisses, le lecteur découvrait une nauséabonde marmite dans laquelle mijotait une ratatouille composée de dénigrements inutiles, de déballages humiliants, de médisances inappropriées, de petites vengeances gratuites, de suspicions infondées, de niaiseries puériles, de rengorgements théâtraux et aussi d’une flagrante contre- vérité. Même un ancien premier adjoint du Maire Brendlé et présumé ami n’échappe pas au coup de griffe (ce « bricoleur de génie » brûle la semelle de sa chaussure sur le pot d’échappement de sa moto).
Pas de quoi se formaliser. La nature des révélations ne dévoilait que la médiocrité de son auteur. Quoique dire de François Bayrou : «Je regrettais son manque de volonté de trancher et d’arbitrer les situations difficiles et conflictuelles» puisse peut-être sembler tout de même un peu présomptueux.
Ce qui peut paraître plus prégnant c’est qu’à travers de nombreuses pages du fascicule, le narrateur expose son obsession de la persécution, se mettant avec complaisance à la place de la victime. (On « l’agresse verbalement », on lui tient des propos « déplacés et tendancieux », on lui en veut, « on s’en prend à sa famille », on le charge de toutes les déconvenues.)
Le récit des nombreuses « affaires » fait apparaître l’ex-maire et ex-conseiller général sous les traits d’un élu incapable de générer confiance, charisme et adhésion.
Quant à la forme de l’ouvrage, il s’agit d’une sorte de pot-pourri où une anecdote distrayante précède une digression sur les supposés avantages de l’élu, et où le récit d’une campagne électorale est suivi de « l’affaire du funérarium ». Un patchwork de notes brouillonnes, ni relues, ni corrigées, dans lequel abondent les fautes d’orthographe, de concordance des temps, de construction, les « mal-dit »et les incorrections.
La phrase : « Animations destinées à attirer le public vers la salle des fêtes et à parcourir ensuite l’exposition » constitue un exemple digne d’illustrer « l’équivoque » dans une phrase.
Madame Brendlé, poétesse à ses heures (en alsacien), agrémente l’ouvrage de ses compositions.
Elle y qualifie la tâche des conseillers municipaux (et de son mari, le maire) de « Baschlerei ». Cet ancien professeur d’allemand peut-il ignorer la connotation péjorative de tout un groupe de mots en « ei » dans la langue de Goethe ?
Et lorsqu’elle se permet de confondre les verbes « gflickt » et « gfickt » nous ne savons pas s’il faut céder à l’hilarité ou à la consternation.
Alors qui s’étonne que « 40 années au service de Benfeld » ait été retiré si vite de la médiathèque après sa parution ? Les époux Brendlé n’auraient-ils pas été bien inspirés de ne jamais diffuser ce malheureux brûlot ?
Car tant de suffisance, de désinvolture, d’indélicatesses, de manque de soin, d’exigence et même de jugement sont une offense au monde des élus locaux et accréditent une déconsidération dont le corps enseignant n’a nul besoin.
Andrée Freppel
Françoise Kastner
(Photo Ralph Hammann)